Une publication dans Nature Communications Physics

Copier les organismes microscopiques pour animer des micromachines



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Des chercheurs du Group of Research and Applications in Statistical Physics (GRASP) de l’Université de Liège viennent de mettre au point une technique qui permet de copier la stratégie de nage des organismes ciliés et donc le développement d’une technique qui permet de produire de la locomotion contrôlées sur des micro-objets en vue de les assembler. Cette recherche, qui pourrait avoir de nombreuses applications tant au niveau médical que sanitaire, vient de faire l’objet d’une publication dans la revue Nature Communications Physics.

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a miniaturisation de circuits électroniques, de moteurs et plus généralement d'instruments est indispensable à la production de micro-objets pouvant équiper téléphones, brosses à dent, drones, etc... Cette miniaturisation nécessite de fabriquer des composantes toujours plus petites, parfois avec une précision de quelques dizaines de nanomètres, des défis rendus possibles grâce aux techniques développées par les physiciens et les chimistes. Cependant, Cette miniaturisation nécessite toutefois de pouvoir placer, attacher, et souder ces composantes les unes aux autres. Des tâches extrêmement difficiles pour lesquelles les industriels ont recourt à des machines robotisées très coûteuses. 

La physique offre pourtant de nouvelles voies pour assembler ces micro-objets. Si des composantes microscopiques sont placées dans un fluide porteur, les éventuelles interactions attractives entre composantes peuvent induire la formation d'une seule structure. Le contrôle de ces interactions, via la forme des objets ou via des champs magnétiques extérieurs, aide le système à former spontanément une structure particulière. Ce processus, appelé auto-assemblage « magnétocapillaire », ne nécessite aucune intervention pour déplacer ou coller des composants. C’est dans cette voies que les chercheurs du GRASP (Group of Research and Applications in Statistical Physics), le laboratoire dirigé par le Pr Nicolas Vandewalle (Unité de recherches CESAM / Faculté des Sciences), ont lancé l’idée de copier le comportement d’organismes vivants afin de permettre l’assemblage de très petits composants.

Depuis dix ans, les chercheurs du GRASP étudient et fabriquent des microstructures dont la taille varie de la centaine de micromètres au millimètre. L’astuce utilisée par le GRASP est de profiter des interactions pour animer des micro-objets qui deviennent, en quelques sorte,  des micro-nageurs - ou des micromachines - capables d’effectuer des opérations dans un fluide. Si les projets développés par les chercheurs du GRASP ont permis de produire des micromachines élémentaires capables de se déplacer, de mélanger des fluides ou encore de transporter une cargaison microscopique, il fallait encore trouver le moyen d’animer des structures complexes formés d’un nombre élevé de composants. 

Chose faite par l’équipe du labo composée d’Ylona Collard, de Galien Grosjean et de Nicolas Vandewalle, qui a eu l’idée innovante de copier la stratégie de nage des organismes vivants et en particulier des organismes ciliés. Ces derniers, qui ont une taille comparable aux auto-assemblages du laboratoire, se déplacent grâce aux « ondes métachronales » qui parcourent les nombreux cils couvrant leur enveloppe. En créant ces ondes métachronales dans les auto-assemblages magnétocapillaires, les chercheurs du GRASP sont parvenus à produire de la locomotion contrôlée et ont prouvé qu’il était possible d’utiliser la même technique quel que soit le niveau de complexité de l’auto-assemblage. 

VANDEWALLE Micromachines 

Rotation d'un auto-assemblage de 13 billes, dont les plus petites ont un diamètre de 400 microns. La rotation est induite par des champs magnétiques variables qui produisent une onde métachronale bien visible sur les billes en périphérie de l'assemblage : chaque particule effectue un mouvement périodique décalé dans le temps par rapport à celui des billes voisines. Cette onde se propage dans le sens anti-horloger.


La locomotion, en particulier la nage, sous l'échelle du millimètre est difficile à mettre en œuvre car les effets hydrodynamiques diffèrent de ceux à grande échelle et conduisent à des phénomènes contre-intuitifs peu explorés en physique. Ces progrès permettent d'entrevoir la possibilité de créer des micro machines qui pourraient interagir avec des organismes vivants, de créer des micro robots pouvant transporter des médicaments à travers le corps humain, ou encore de les répliquer afin d’obtenir une armée de mini systèmes capables de nettoyer/dépolluer une étendue d’eau. 

Référence scientifique

Magnetically powered metachronal waves induce locomotion in self-assemblies, Nature Communications Physics, 19 June 2020.

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