ADDovenom : un traitement innovant pour réduire les décès liés aux morsures de serpents

Projet scientifique



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©Simon Townsley

Un nouveau projet européen, porté par l’Université de Bristol et auquel participe le Laboratoire de Spectrométrie de masse (Unité de recherche MolSys / Faculté de Sciences) de l’ULiège, va développer une nouvelle approche curative permettant de réduire le nombre de décès liés aux morsures de serpents. Avec un coût de production réduit, et un spectre d’application élargit, ADDovenom exploitera la plate-forme innovante ADDomer© pour concevoir une thérapie antivenimeuse à partir de particules pseudo-virales (VLP) d’une efficacité clinique inégalée.

Déclarées récemment par l'OMS comme l'une des maladies tropicales les plus négligées, les morsures de serpents s’avèrent dangereuses lorsque les toxines injectées pénètrent dans la circulation sanguine et s’attaquent aux systèmes sanguin et nerveux. Dans les régions tropicales pauvres et reculées où l'accès immédiat à des soins médicaux spécialisés est limité, les morsures de serpents causent chaque année entre 80.000 et 140.000 décès, auxquels s’ajoutent environ 400.000 incapacités chez les victimes survivantes souffrant principalement de paralysies, d’amputations, de cicatrices et de défigurations, des séquelles importantes, entraînant souvent la mise à l’écart de ces individus en raison des préjugés culturels enracinés dans ces régions.

Le traitement le plus efficace utilisé actuellement est un sérum antivenimeux contenant des anticorps prélevés sur des chevaux et des moutons immunisés contre les toxines du venin. Bien que ce traitement ait sauvé de nombreuses vies, il reste faiblement efficace ; les venins de serpents et leurs toxines variant considérablement d'une sous-espèce à l'autre. Seulement 10% à 15% des anticorps contenus dans les sérums se lient aux toxines du venin et présentent un caractère thérapeutique. De plus, pour traiter efficacement une victime, plusieurs flacons d'anti-venin sont souvent nécessaires, chaque flacon supplémentaire induisant des niveaux plus élevés d'effets secondaires indésirables et des coûts de traitement accrus.

C’est dans ce contexte que le projet ADDovenom, financé par l'Union européenne à hauteur de 3,6 millions pour une durée de 4 ans a été mis sur pied. Porté par l’Université de Bristol, en collaboration avec l’Université de Liège, la Liverpool School of Tropical Medicine (LSTM),  l’Université D’Aix-Marseille et de l’Instituto de Biological Experimental é Tecnologica (Portugal), souhaite créer une nouvelle approche thérapeutique pour neutraliser et éliminer les toxines venimeuses de la circulation sanguine avec plus d'efficacité, de sécurité et à un prix bien plus abordable que ce qui est disponible aujourd'hui.

L’équipe de recherche exploitera entre autres des techniques d’analyse de pointe pour identifier et séquencer les protéines constituant le venin des serpents subsahariens les plus venimeux comme la vipère des pyramides, le mamba vert et leurs espèces apparentées. Utilisant l'ingénierie des protéines et la plateforme ADDomer©, l'équipe développera alors un procédé de traitement unique contre les morsures de serpents, les ADDomer© étant préparés dans le but de neutraliser les toxines indépendamment de l'espèce ou de la géographie, et ainsi annihiler leur fonction pathogène, sans risque d'effets indésirables. 

« Le laboratoire de spectrométrie de masse (MS-Lab) de l’Université de Liège aura, entre autres, pour objectif d’établir très précisément la composition moléculaire des venins de huit serpents africains des plus dangereux (4 mambas et 4 vipères), explique le Professeur Loïc Quinton, chargé de cours au sein du Laboratoire. Le MS-Lab combinera alors des approches protéomiques, transcriptomiques (LSTM) et bioinformatiques, afin de contribuer à la détermination des toxines les plus dangereuses, à neutraliser prioritairement dans chacun des venins étudiés ». Le laboratoire mettra également son expertise à disposition du projet pour le contrôle qualité de la production des toxines nécessaires au projet, ainsi que pour établir de nouvelles approches innovantes permettant de caractériser l’efficacité des ADDomer© préparés pour lier les toxines des venins et ainsi de les purifier de milieux biologiques.

L’approche avancée par l’équipe du projet ADDovenom peut être mise en œuvre avec des technologies abordables et nécessitant une logistique de fabrication réduite. Contrairement aux anti-venins utilisés jusqu’ici et qui doivent être maintenus réfrigérés pour conserver leur efficacité, ce nouveau type de traitement pourra être conservé à température ambiante. Une particularité qui permettra de stocker les traitements directement dans les communautés agricoles reculées d’Afrique subsaharienne où les morsures de serpents sont les plus fréquentes, favorisant un traitement rapide des victimes et augmentant considérablement leurs chances de survie.

ADDovenom

Le projet «ADDovenom: Novel Snakebite Therapy Platform of Unparalleled Efficacy, Safety and Abordability», financé à hauteur de 3,6 millions d’euros par l'Union Européenne dans le cadre des Technologies Futures et Emergentes (EU-FET), d'une durée de quatre ans, a débuté le 1er octobre 2020. Les institutions partenaires comprennent: La Professeure Christiane Berger-Schaffitzel, (coordinatrice et responsable de l'étude) Université de Bristol; le Professeur Imre Berger, Directeur du Max Planck Bristol Centre (partenaire) Université de Bristol; le Professeur Robert Harrison et le Professeur Nicholas Casewell de la Liverpool School of Tropical Medicine (LSTM), le Professeur Loïc Quinton à l'Université de Liège; le Docteur Renaud Vincentelli de l'AFMB, CNRS-Université d'Aix Marseille; la Professeure Paula Alves et le Dr Antonio Roldao à l'Instituto de Biologia Experimental e Tecnologica (iBET, Portugal).

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