Rencontre avec Leila Rebbouh, licenciée en Sciences physiques (2002) et Docteure en Sciences (2007).  Elle travaille actuellement pour Delaware IT consulting. D’hyperspécialisée, sa carrière riche et atypique a fait d'elle une personne hyper polyvalente.

alumni Rebbouh

Formation

Pouvez-vous résumer votre parcours ?

Adolescente, je voulais construire des fusées. C’est ainsi que j’ai passé l’examen d’entrée et entamé des études d’ingénieur civil. Mais cela ne s’est pas très bien passé : je me suis sentie perdue dans ces grands auditoires où se réunissaient plus de 200 étudiants majoritairement masculins et où l’esprit de compétition était très présent.  Après la première session où je n’avais échoué qu’un examen sur trois, j’ai abandonné. J’ai signé en seconde session pour éviter de perdre ma bourse d’étudiante. Je me suis réorientée vers la physique : de tous les cours suivis en première candidature ingénieur, c’était celui qui m’intéressait le plus.

Pourquoi avez-vous choisi d'étudier cette matière à la Faculté des Sciences de l’Université de Liège ?

Je proviens de la région liégeoise et comme tous mes camarades de classe de secondaire, j’ai naturellement été à l’Université de Liège pour poursuivre mes études.

Pourquoi avez-vous décidé de poursuivre avec un doctorat ?

Pendant ma licence en sciences physiques, j’avais entrepris de faire l’agrégation. Je me destinais donc à enseigner dans le secondaire. Une fois mes études terminées, je n’ai pas obtenu d’emploi dans une  école d’enseignement général. A 22 ans, j’ai donc commencé ma carrière dans l’enseignement technique et professionnel. C’était extrêmement compliqué pour une personne inexpérimentée. Au bout de deux mois, j’ai démissionné.

En même temps, une professeure de l’université a eu vent de mes difficultés et m’a proposé un contrat de chercheur région wallonne où je pouvais réaliser un doctorat. J’ai accepté, sans même savoir ce que j’allais faire concrètement ! C’est donc par un concours de circonstances que je suis devenue docteure.

Points forts de la formation

Lors de ma formation, j’ai appris la rigueur, la structure et la prise de décisions sur base de données scientifiques et d’analyses documentées.

Leila Rebbouh

Profession

J’ai une carrière très atypique pour un profil de docteure en sciences. J’aime la nouveauté et je ne reste jamais plus de 4 ou 5 ans dans un même endroit/entreprise/fonction. Cela m’a permis de développer des expertises dans de nombreux domaines et d’élargir mon champ d’action. D’hyperspécialisée, je suis devenue hyper polyvalente.

J’ai travaillé en recherche et développement dans des multinationales telles que Toyota Motor Europe où je travaillais sur les premiers moteurs hybrides ou encore Huntsman où je désignais les propriétés de composants de polymère pour diverses applications.

J’ai enseigné dans de nombreux établissements, tous réseaux et niveaux confondus. J’ai ainsi enseigné la data science à la haute école Hénallux, la chimie des matériaux à l’ESA Saint-Luc, la pratique de laboratoire de physique au Centre Universitaire du Luxembourg, ou encore les mathématiques à l'Institut Saint-Laurent de Promotion Sociale. J’ai souvenir d’avoir reçu un énorme bouquet de fleurs de la part de mes étudiants  en ingénieur électromécanique à la fin de ma première année de cours à Saint Laurent. C’était inattendu et particulièrement touchant. Ma plus belle expérience dans l’enseignement reste certainement une école d’enseignement spécialisé où j’expliquais les additions à des adolescents caractériels. Ils ne le savent certainement pas mais ils m’ont appris plus que ce que je ne leur ai appris.

J’ai fait quelques allers retours avec le milieu de la recherche fondamentale : j’ai été chercheure associée pendant 2 ans à l’Université du Manitoba à Winnipeg au Canada où j’ai développé un laboratoire de spectroscopie Mossbauer, j’ai aussi été coordinatrice d’un projet de microgrid à la Faculté des Sciences Appliquées chez le Prof. Leclercq, et puis, j’ai également eu l’opportunité de participer à un projet de recherche sur la conservation et restauration des zelliges marocaines avec la Prof. Fagel.

En 2013, j’ai créé une boite de consultance en Data Science à Liège, LR Data Science. Nous avons eu une période faste avec 1 million de chiffre d’affaires en 2018 et une dizaine d’employés répartis entre Chicago et Liège. J’ai même eu quelque side projects dans la blockchain et le bitcoin ! Cependant, l’essentiel de mes clients étaient de grosses sociétés dans le retail américaines ou françaises.

Il m’arrivait d’avoir quelques missions ponctuelles pour le fournisseur de services IT, NRB, à Herstal. En 2019, NRB m’a proposé de créer le groupe de Data Science et d’intelligence artificielle. En trois ans, le groupe a atteint 15 collaborateurs et nous avons livré une petite dizaine de projets en Data Science et AI pour nos clients.

Depuis peu, j’ai rejoint Delaware, une société de services IT. Bien qu’extrêmement réputé en Flandres, Delaware est peu connu en Wallonie. L’ambition de Delaware est de devenir aussi un acteur incontournable en Wallonie.

Mon travail consiste à développer l’offre et la pratique de la Data Science et de l’Intelligence Artificielle en Wallonie. Pour cela, je dois proposer des solutions innovantes aux entreprises wallonnes qui utilisent encore très peu ces technologies.  Je suis présente sur le projet et je m’assure de son bon déroulement. Je construis et forme les équipes- souvent interdisciplinaires- pour mener à bien ces projets.

La consultance est un travail varié : on change souvent de projet, de client, de sujet. Pour quelqu’un comme moi qui aime beaucoup le changement, c’est ce qui me plaît le plus.

Apport de votre formation

Quels ont été les apports de votre formation dans votre vie professionnelle ?

La résilience est une qualité importante quand on travaille dans le milieu de la consultance. C’est durant ma thèse – en particulier la dernière année  – que je l’ai apprise dans beaucoup de souffrances.

Et sur le plan personnel ?

La résilience aussi. J’ai eu une vie personnelle aussi mouvementé que ma vie professionnelle ! 

Souhaitez-vous partager une anecdote, un évènement particulièrement enrichissant/valorisant de votre parcours/carrière ?

Un étudiant qui faisait son stage de Data Science dans ma petite société m’a demandé une lettre de recommandation pour postuler au master de data science du MIT. Suite à son entretien, le MIT m’a contacté pour corroborer la lettre de recommandation que je lui avais fournie. J’ai été très impressionnée que le MIT prenne la peine de me contacter pour évaluer un candidat. L’étudiant a été admis et a réussi le MIT. Il a rejoint JP Morgan à Londres à la fin de ses études.

Avoir l’opportunité de transmettre et de donner un petit coup de pouce à des étudiants stagiaires, c’est quelque chose de très valorisant.

Quels sont vos projets pour le futur ?

Dans quelques années, je souhaite retourner vivre en Amérique du Nord. Je ne sais pas exactement ce que j’y ferais mais il y a longtemps que l’inconnu ne me fait plus peur !

Aux futur·es étudiant·es

On va vous apprendre des tonnes de choses très intéressantes et très pointues. Mais ce qui vous sera le plus utile à vous et à la société, c’est de les appliquer ‘out of the box’. Car la créativité ne s’apprend pas : elle se nourrit.

Leila Rebbouh

Publié par Sylvie Marchal, le 7 juin 2023

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